Afrique : Une nouvelle ère pour l’Église et le continent, et si l’Afrique portait le prochain pape ?

Alors que le monde catholique pleure la disparition du Pape François, décédé le 21 avril 2025, les projecteurs se tournent déjà vers la chapelle Sixtine où, dans quelques jours, les cardinaux réunis en conclave devront élire son successeur. Pour la première fois dans l’histoire contemporaine, une hypothèse prend corps avec une intensité nouvelle : l’élection d’un pape africain. Un événement qui, s’il se concrétisait, ne marquerait pas seulement un tournant pour l’Église catholique, mais constituerait un symbole puissant pour l’Afrique, souvent perçue à la périphérie des grandes décisions religieuses et géopolitiques.
Une Église en mutation, un continent en ascension
Avec près de 250 millions de fidèles, soit environ 20 % des catholiques dans le monde, l’Afrique est aujourd’hui le cœur battant de l’Église catholique. Alors que la pratique religieuse décline dans certaines régions d’Europe, les églises africaines restent pleines, vibrantes, actives. Dans les villes comme dans les villages, la foi ne se vit pas en silence : elle est chantée, dansée, prêchée, vécue au quotidien. Ce dynamisme, cette ferveur populaire, sont aujourd’hui incontournables dans toute réflexion sur l’avenir de l’Église universelle.
L’arrivée d’un pape africain viendrait donc reconnaître une réalité spirituelle et démographique déjà bien installée, mais longtemps ignorée au sommet de la hiérarchie ecclésiale. Ce serait aussi une réponse forte aux appels à une Église plus inclusive, plus représentative de sa diversité mondiale.
Une voix du Sud pour une Église plus équitable
L’accession d’un Africain à la papauté serait également un acte de justice symbolique, dans un monde catholique encore marqué par une centralisation romaine issue de siècles d’hégémonie européenne. Un pape africain ne serait pas seulement un leader spirituel : il incarnerait la voix du Sud global dans les grandes orientations morales et sociales de l’Église, sur des questions telles que la pauvreté, l’environnement, les migrations, ou encore la colonisation culturelle et religieuse.
Qu’il s’agisse du Cardinal Fridolin Ambongo, engagé sur les questions sociales en RDC, de Peter Turkson, artisan d’un dialogue interculturel au Vatican, ou encore de Robert Sarah, défenseur d’une Église fidèle à la tradition, chacun d’eux porte en lui une histoire, une identité, un ancrage africain qui pourrait rééquilibrer les priorités de l’Église.
Un levier de dignité et d’influence pour l’Afrique
Sur le plan politique et diplomatique, l’élection d’un pape africain aurait un impact majeur. Elle renforcerait le soft power du continent, encore trop souvent marginalisé dans les grands forums de décision mondiale. Un pape africain pourrait devenir un ambassadeur moral de l’Afrique, portant haut les causes du continent : justice économique, souveraineté culturelle, paix et réconciliation.
Pour la jeunesse africaine, en quête de repères et souvent en perte de confiance envers ses institutions, cette élection pourrait incarner un regain de fierté, un signal d’espoir, une démonstration que l’Afrique peut aussi conduire les destinées spirituelles du monde.
Mais cette responsabilité ne sera pas sans défis. Un pape africain devra composer avec une Église plurielle, parfois fracturée, où les tensions idéologiques (entre tradition et modernité) sont palpables. Il devra garder l’équilibre entre l’enracinement dans sa culture d’origine et la mission universelle de l’Église.
Il lui faudra aussi éviter le piège d’une représentation symbolique sans pouvoir réel. L’Afrique ne doit pas être un simple décor ou un argument moral : elle doit peser sur les décisions, être écoutée, respectée, consultée.
Le conclave de 2025 pourrait être un moment historique, non seulement pour l’Église catholique, mais pour l’Afrique entière. Si le prochain pape est africain, ce ne sera pas une faveur faite au continent. Ce sera la reconnaissance d’un mérite, d’une vitalité, d’une foi vivante. Et peut-être, l’ouverture d’un nouveau chapitre où l’Afrique ne sera plus seulement évangélisée, mais évangélisatrice, actrice à part entière d’une Église réconciliée avec son avenir.